Gilbert Bawara invite à faire du double scrutin du 29 avril « un référendum pour ou contre la réforme constitutionnelle engagée ». Quelques jours après l’adoption de la révision constitutionnelle par l’Assemblée nationale, le Togo est en instance de passer à un régime parlementaire. En attendant la promulgation de la nouvelle constitution par le président de la République, Faure Gnassingbé, ne rate pas l’occasion de vanter les avantages de la nouvelle constitution comme gage d’une meilleure gouvernance.
En changeant le régime semi-présidentiel du Togo en régime parlementaire, Gilbert Bawara interviewé par les confrères du journal français ‘’Le Point’’ atteste de la justesse et l’opportunité de la révision constitutionnelle. « Cette réforme procède du constat que la cristallisation autour de la fonction du président de la République, la concentration des pouvoirs entre les mains d’un seul homme ou d’une seule femme était de nature à fragiliser l’institution étatique. Désormais, la magistrature suprême est, selon les termes de la nouvelle Constitution, vidée de sa substance puisque Le nouveau président est privé de toute prérogative », a indiqué le ministre. Pour lui le renversement des pouvoirs au Burkina Faso, au Mali et la crise sécuritaire au Sahel doit donc conduire à « sortir de la logique de l’hyperprésidentialisation pour faire émerger des institutions plus ouvertes et fortes ».
« Le président du Conseil est l’émanation d’une majorité par rapport à l’autre, il est donc obligé de s’entendre avec l’Assemblée nationale. Ce système nous paraît bien plus ouvert et démocratique. Et puis sur le plan financier, nous allons faire des économies en organisant quatre élections au lieu de cinq. Ce n’est pas négligeable ». De surcroît, le ministre togolais soutient que ce régime va susciter l’émulation au sein de la classe politique togolaise. « Avec cette réforme les partis vont comprendre que leur avenir dépend de leur implantation sur le territoire national. Cela permet de réduire les tensions et les conflits politiques inutiles ». Pour Gilbert Bawara, ce nouveau régime politique est une ère nouvelle. « Nous voulions tracer une autre voie afin d’aider les partis à évoluer vers un pluralisme rationnel. Nous ne pouvons pas être dans un mimétisme permanent, surtout quand il faut dans le même temps développer nos économies, lutter contre le changement climatique, etc. ».
Face aux contestations du nouveau régime parlementaire par l’opposition et la la société civile, le ministre invite les partis en lice aux prochaines élections législatives et régionales à faire de ce scrutin, un référendum pour ou contre la réforme constitutionnelle engagée. L’opposition a « l’opportunité d’aller vers nos concitoyens pour expliquer les raisons pour lesquelles elle est opposée et ce qu’elle fera si elle remportait la majorité à l’Assemblée nationale. De notre côté, nous irons vers les populations pour leur expliquer le bien-fondé, les avantages et les enjeux de cette réforme. Notre message est clair: donnons-nous les moyens de mettre en œuvre ce changement de régime. Les Togolais trancheront le 29 avril ». Il poursuit en ces termes : « à supposer que l’opposition gagne la majorité, libre à elle de mettre en œuvre ou pas cette réforme. Elle peut très bien décider, éventuellement, de rétablir la situation existante ».
L’un des reproches fait à la nouvelle constitution est la non limitation du mandat du président du Conseil des ministres. Sur ces questions, Gilbert Bawara ne cache pas sa position. « Je n’ai jamais été convaincu par la limitation des mandats qu’ils soient présidentiels ou autre. Cela ne garantit pas la démocratie. Prenez le cas de la Tanzanie, le Chama cha Mapinduzi de Julius Nyerere est toujours au pouvoir depuis l’indépendance en 1962. Ce qui change, ce sont les hommes et femmes, mais c’est la même politique socialiste qui est appliquée ».Pour l’officiel togolais la démocratie doit donc être appréhendée en tenant compte du contexte local de chaque pays, notamment son histoire et ses réalités.
Sur le sujet de renouvellement de la classe politique, Gilbert Bawara partage cette poignante anecdote. « C’est au sein de l’opposition togolaise que le déficit de renouvellement de l’offre politique est criant. Lorsque j’étais étudiant, Jean-Pierre Fabre était secrétaire général de l’Union des forces de changement (UFC)! L’UNIR a su se renouveler et aujourd’hui nos aînés sont devenus nos conseillers, ils ne sont plus ministres ni députés ».
Le modèle qui a inspiré cette démarche du Togo, selon l’officiel est celui de l’Allemagne. « Il n’y a pas de modèle parfait, tout dépend du comportement des femmes et des hommes », a-t-il poursuivi.