L’un après l’autre, l’ANC et les FDR refusent de rejoindre la nouvelle législature issue des législatives du 29 avril 2024. Jean-Pierre Fabre de l’Alliance nationale pour le changement (ANC) et Dodji Apévon, des Forces démocratiques pour la République (FDR), renoncent à siéger à l’Assemblée nationale prétextant de présumés cas de fraudes. Par ce refus, le couple ANC-FDR veut également marquer leur rejet de la nouvelle constitution. Mais quelle est la portée de cette stratégie de la chaise vide au sein de la 1ère chambre du parlement, le cœur de la vie démocratique, lieu de débat par excellence dans l’arène parlementaire.
C’est le paroxysme de la politique de la chaise vide, estiment bon nombre de Togolais. C’est la négation même des efforts, et de leurs militants qui se sont battus pour les faire élire, et des électeurs qui ont porté leur choix sur eux, pour aller défendre leurs voix à l’Assemblée nationale. En tout cas, très peu de Togolais partisans de l’opposition ou non, adhèrent à ce refus des candidats de l’ANC et du FDR élus dans le grand Lomé.
En chute libre depuis l’élection présidentielle de 2020, le parti ANC n’a obtenu qu’un siège aux législatives d’avril dernier. Jean-Pierre Fabre a refusé de siéger à l’Assemblée nationale en arguant des irrégularités lors du scrutin. Mais par ce boycott, il dénonce également la nouvelle constitution de la Vè République. Quant aux FDR, siéger reviendrait à reconnaitre la nouvelle constitution. C’est ainsi que le 04 juin dernier, Me Dodji Apevon et ses militants ont à leur tour officialisé leur refus de se faire représenter à l’Assemblée nationale.
Stratégiquement, ce refus inscrit les deux chefs de partis dans un élan jusqu’au-boutiste et d’opposants radicaux. Une fermeté qui s’identifierait plus à leur fibre émotionnelle qu’à un vrai stratagème politique visant à provoquer un revirement de situation à leur faveur. En refusant de participer à la vie de l’institution, le couple ANC-FDR se met en marge des grandes questions politiques et de gouvernance sur lesquelles, il pourrait influencer ou enrichir les débats.
Par contre, certains observateurs pensent que la présence de Jean Pierre Fabre et de Me Dodji Apevon à l’hémicycle, ne servirait que de simple faire valoir pour le parti au pouvoir. Noyés dans la masse des 108 députés de l’Unir, avec que 5 élus de l’opposition, ces partis seront plus spectateurs qu’acteurs. D’où peut-être ce refus de siéger.
Tout de même, en refusant de siéger, c’est également un mauvais signal que ces deux partis envoient à leurs militants. Ce faisant le couple boycotteur semble implicitement balayer du revers de la main, la confiance placée en eux par leur électorat. Pour d’aucuns, c’est un manque de considération à l’endroit de cet électorat qui leur a accordé ses voix. En passant des heures dans une file sous le soleil pour au final voter pour l’ANC ou les FDR, l’électeur montre son désir de se faire représenter à l’Assemblée nationale par ce candidat, et non subir un refus de siéger de sa propre part.
Si ces deux partis minimisent leur présence à l’Assemblée et infèrent qu’elle n’aura aucun effet sur les votes, ce n’est assurément pas leur absence qui améliorerait les choses. Encore moins, ce refus de siéger ne pourra pas arrêter la vie de l’Assemblée. Et l’élection du nouveau bureau de la nouvelle législature, ce jour-même le confirme si bien.
Mieux, par le passé, le refus de siéger ou la non-participation n’a toujours fait que créditer les lois et les textes votés à l’Assemblée de scores très lumineux. Des textes et lois qui se sont imposés à la vie nationale et aux événements politiques auxquels tous les partis ont souvent pris part, y compris ceux qui refusent de siéger. L’exemple fort et récent : la non-participation aux législatives de décembre 2018 a produit une Assemblée qui a été sérieusement légitime et légale pour prendre tous les textes qui ont conduit aux législatives d’Avril 2024 : augmentation du nombre de sièges à l’Assemblée, revue du cadre électoral, etc.
De plus, ce n’est pas la présence des ténors de la dimension Aimé Gogué et Brigitte Adjamadjo qui discréditerait la nouvelle législature.
Retour à cette sagesse qui enseigne avec adresse : « Un, tiens vaut mieux que deux tu l’auras ». Quid désormais de la procédure de leur éventuel remplacement à l’Assemblée nationale.
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