L’artiste plasticien Jhade de BEAUMONT vient de s’installer à Lomé où il ambitionne collaborer avec les artistes nationaux pour réaliser des projets gagnant-gagnant. Pour ce faire, il déniche des artistes de l’ombre, les accompagne à travers des salons, foires et expositions au plan national et international.
Il est entré en action avec la toute première exposition qui est une collaboration entre deux artistes plasticiens où la valeur de la beauté féminine est sublimée.
La collaboration entre deux artistes plasticiens
Le mois dernier, il s’est déroulé à la galerie Jhade de BEAUMONT ARCANE 21 sise non loin du stade de Kégué à Lomé, l’exposition « la créativité est un langage inconnu que tout le monde comprend ». Cette exposition a mis en avant vingt tableaux de deux artistes plasticiens respectivement Jhade de BEAUMONT, promoteur de ladite galerie et Meli.LA.
Les deux artistes ont en commun la valorisation de la beauté féminine. Leur particularité se retrouve dans leur technique de travail. Jhade de BEAUMONT met l’accent sur les courbes pour faire ressortir des formes féminines, alors que Meli.LA pour exprimer la beauté de la femme africaine utilise plusieurs couleurs qui renvoient à la mosaïque. Au cœur de cette exposition se trouve le tableau intitulé « la femme culturelle » de Meli.LA.
« La femme culturelle »
« La femme culturelle » est un tableau carré de 1,20 mètre de côté, réalisé en 2023 par l’artiste togolaisMeli.LA. Avec cette œuvre, il fait le portrait en buste d’une femme qui a mis un foulard sur sa tête et porte une cascade de perles au cou.
Le portrait occupe tout le tableau et fait ressortir une mise en scène de la beauté de la femme africaine par l’utilisation de plusieurs couleurs. Ces couleurs complémentaires donnent une harmonie qui se reflète et se répète sur le foulard, le visage, les colliers et le caméléon. Le caméléon est posé sur une tige sur la tête de la femme. Ceci exprime une proximité entre cette femme et la nature mais aussi un retour aux sources accentué par le port de perles et de foulard. Son immense désir d’être proche de la nature se voit à travers les motifs de feuille sur son foulard, des feuilles naturelles de la tige du caméléon. Le caméléon de cette œuvre évoque celui mentionné par Amadou Hampâté Bâ dans Amkoullel, l’enfant Peul « Et que fait le caméléon quand il arrive dans un endroit? Il prend la couleur du lieu. Ce n’est pas de l’hypocrisie. C’est d’abord la tolérance et le savoir-vivre. » Le savoir-vivre affiché de cette femme qui a des yeux grands ouverts, est imperturbable et regarde devant elle, c’est cette manière qu’elle a d’arborer fièrement les perles et le foulard, considérés ici comme des signes authentiques de son patrimoine culturel.
La cascade des perles
La femme culturelle a le cou bien dressé et paré de colliers de perles. Les perles sont rondes ; six de grosses graines pendent vers sa poitrine en cascade et celles qui sont de petites graines sont serrées autour de son cou.
Les perles ont une origine très lointaine en Afrique et ont servi dans le commerce ou ont été échangées contre de l’ivoire et des esclaves. Il existe des perles en verre, en pierres naturelles et en terre cuite. Les perles servent à embellir le corps entier. Elles sont portées aux oreilles comme boucles d’oreilles, au cou comme collier, au poignet comme bracelets et mis à la hanche comme bijou de taille, dans les cheveux, au bras, au genou et à la cheville. Les perles que porte « la femme culturelle » témoignent de sa maturité, sa beauté, son statut social et sa richesse. L’artiste en faisant un rapprochement entre la femme et le caméléon qui adopte les couleurs du milieu où il se trouve montre l’adaptabilité de cette femme qui porte différentes perles venant de différentes régions de son pays. En tant que femme togolaise, elle incarne la cohésion sociale et l’unité, valeurs qui se retrouvent également dans son foulard qui cache sa chevelure et ne laisse entrevoir que deux tresses de cheveux qui descendent sur son dos.
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Le foulard d’hier à aujourd’hui
Le foulard est un morceau de tissu qui a toujours existé dès l’apparition du tissage. Il est porté de différentes manières : à la ceinture, autour du cou et sur la tête pour une journée ordinaire à la maison ou pour une occasion spéciale. Il est mis pour éviter de se coiffer pendant la journée, pour protéger ses cheveux pendant la nuit, pour participer à une cérémonie ou une fête. Si certaines le portent aujourd’hui uniquement pour exprimer un style personnel, le foulard a longtemps été et reste dans certaines communautés un indicateur visuel précieux de l’âge, l’état civil, la spiritualité ou encore la richesse d’une femme. « La femme culturelle » est fière de ce qu’elle porte. Elle se situe à contre-courant de la mode capillaire actuelle dominée par les cheveux lisses, les perruques etc. Elle semble même inviter d’autres jeunes femmes à faire un retour aux sources et à se reconnecter à l’esprit d’élégance de la noblesse d’antan. En effet, selon le site Afro Élégance, le foulard « était principalement porté par les femmes de la famille royale : la famille royale égyptienne, les reines nigérianes et nubiennes. » https://afro-elegance.com › accessoire-africain
Avec « la femme culturelle », l’artiste Meli.LA a choisi sans détour de mettre en valeur le riche patrimoine culturel du Togo à travers les perles multiformes, multicolores et le foulard. C’est une célébration de l’identité féminine, sans complexe, ancrée dans des standards de la beauté noire. L’artiste invite également à travers cette femme à l’unité et à la cohésion sociale.
Jhade de BEAUMONT artiste plasticien, écrivain et ostéopathe compte poursuivre son action avec une imminente exposition, les émissions de sensibilisation de la population au goût de l’art dans les télévisions et radios de la place et la mise sur pied d’une association des artistes.
TOMFAI Badjala, critique d’art