Le 25 janvier 2025 à Lomé, écrivains, amoureux de la littérature et proches se sont réunis pour célébrer la sortie de « Corps Jeunes » une œuvre signée Théo Ananissoh. Cet écrivain togolais, connu pour son style précis et évocateur, partage dans ce livre son expérience en Tunisie, où il s’est immergé dans la réalité des adolescents pour explorer leur quête de liberté.
En décembre 2007, à l’invitation de l’Institut français de coopération en Tunisie, Ananissoh et quatre autres auteurs se sont vu confier une mission : écrire autour du thème de l’ »adolescence ». Pendant plus de trois semaines, l’écrivain a arpenté les ruelles de Tunis et d’autres villes, pour dialoguer avec des jeunes, observer leurs réalités et leurs aspirations. De cette résidence d’écriture est née une œuvre, initialement publiée en 2009 dans un recueil collectif intitulé Vingt ans pour plus tard par les éditions Elyzad. Quatorze ans plus tard, ce texte voit le jour au Togo grâce aux éditions Continents, sous la forme d’un ouvrage indépendant.
L’oppression sexuelle des jeunes
Lors de la soirée de présentation et de dédicace, le critique littéraire Ayayi Apedo-Amah a mis en lumière les thématiques au cœur de ce récit. Selon lui, l’ouvrage met en évidence une réalité universelle, mais particulièrement marquée dans les sociétés nord-africaines : l’oppression sexuelle des jeunes, et plus spécifiquement des jeunes filles. Ces dernières, souvent contraintes de préserver leur virginité jusqu’au mariage, expriment une rage sourde face à ces attentes sociales oppressives.
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À la page 80, l’auteur rapporte les mots poignants d’une adolescente : « Les filles aussi ont envie. » Une phrase qui traduit une frustration profonde, une envie de liberté étouffée par les normes patriarcales. Pour Apedo-Amah, il s’agit d’un exemple flagrant de l’ »oppression de la femme par une société façonnée par les hommes et pour les hommes ».
Des échanges riches en questionnements
Lors des échanges qui ont suivi la présentation, Théo Ananissoh a répondu aux nombreuses questions du public. Pourquoi avoir choisi d’insister sur la sexualité des jeunes ? « Ce sont les jeunes et les personnes interrogés qui m’ont imposé ce que j’ai écrit. Je pense que c’est une obsession dans les pays musulmans…Les contraintes poussent les gens à tricher, à mentir… Je ne m’attendais à ça avant d’interroger les jeunes. »
L’auteur a également évoqué les différences entre le travail journalistique et l’écriture littéraire, soulignant que son approche dans Corps Jeunes visait avant tout à traduire l’âme des témoignages recueillis. Pour lui, cette expérience en Tunisie a été l’occasion d’expérimenter un nouveau genre littéraire et de livrer une réflexion intime sur des problématiques sociétales universelles.
Une maison d’édition au service des écrivains africains
Ce récit, désormais publié par les Éditions Continents, marque une nouvelle étape dans le parcours littéraire de Théo Ananissoh. Après Reconnaissance, son premier ouvrage publié par la maison en 2019, Corps Jeunes vient enrichir le catalogue d’une maison d’édition qui se consacre, depuis 2011, à la promotion des écrivains togolais et africains, qu’ils vivent sur le continent ou à l’étranger.
La soirée s’est conclue sur une note d’espoir : celle d’une littérature africaine toujours plus ancrée dans les réalités locales, mais capable d’éclairer des enjeux universels.