La pollution numérique est devenue la nouvelle attraction. Il semble que le numérique est le nouveau charbon du 21e siècle. Il convient donc de commencer dès maintenant à réfléchir à des moyens d’atténuation. L’on doit éviter le piège dans lequel l’on s’est enfermé avec le charbon à proprement parler. Surtout qu’aujourd’hui, le monde entier est très dépendant des équipements numériques.
« Contrairement à ce qu’on a longtemps affirmé, l’économie numérique n’est ni immatérielle ni verte. Elle produit des dommages écologiques importants, dont les conséquences sont très inégalement réparties à la surface du globe », écrit Sébastien Broca, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication. Auteur d’Utopie du logiciel libre. Du bricolage informatique à la réinvention sociale, Le Passager clandestin, Paris, 2018.
Selon le spécialiste, le fonctionnement de l’économie-monde numérique n’abolit pas les limites écologiques : il les déplace. La fabrication des ordinateurs et des téléphones portables absorbe à elle seule 23 % de la production mondiale de cobalt et 19 % des métaux rares. Or le cobalt provient majoritairement de la République démocratique du Congo, où il est souvent extrait par des enfants dans des zones de conflit, au mépris des droits humains et de l’environnement.
Quant aux terres rares, la Chine domine leur production mondiale, mais au prix de pluies acides et d’une contamination aux métaux lourds de ses terres arables et de ses réserves en eau. Selon deux rapports récents, la pollution numérique représente plus de 4 % de la consommation d’énergie primaire au niveau mondial, et cette consommation augmente de 9 % par an, à mesure que les pays émergents s’équipent et que les usages se diversifient.
C’est la fabrication des terminaux et des infrastructures de réseaux qui pèse le plus lourd dans ce bilan, suivie par la consommation des équipements, du réseau et des fermes de serveurs (data centers). La construction d’un ordinateur portable émet ainsi environ 330 kilogrammes d’équivalent CO2, tout en nécessitant énormément d’eau et de matières premières, notamment des métaux comme le palladium, le cobalt ou les terres rares. Le fonctionnement des data centers génère à lui seul 19 % de l’empreinte énergétique totale du numérique.
Le simple visionnage en ligne de vidéos, qui sont stockées au sein de ces gigantesques infrastructures matérielles, aurait engendré en 2018 autant de gaz à effet de serre qu’un pays comme l’Espagne.
Cet article est rédigé en collaboration avec l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD), organe subsidiaire de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et l’Initiative jeunesse de lutte contre les changements climatiques rendue possible grâce au soutien financier du gouvernement du Québec.
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