La poésie est un art ou une forme d’expression qui cherche à évoquer et à transmettre aux autres les sentiments qu’un homme ou qu’une femme peut éprouver, les méditations qu’il ou qu’elle poursuit dans la solitude, par le seul moyen de son langage. Dans la poésie, les mots de tous les jours, assemblés en un certain ordre, ont un pouvoir nouveau, par leur sens et tout ce qu’ils peuvent représenter dans l’imagination de chacun, mais également par leurs sonorités, les rapports de ces sonorités entre elles, la multiplicité des rythmes qui en résultent, ainsi que par les comparaisons et les images qui donnent à voir autre chose que ce que les mots disent. Cet article se propose de présenter aux lecteurs des passages de ce recueil qui sont très évocateurs du fabuleux privilège de toucher et d’émouvoir à partir de la parole quotidienne dont disposent les poètes Patron Henekou et Kokoè Essénam Kouévi. Des mots qui se laissent délecter aisément, libérés de tout commentaire et analyse. Qu’en est-il véritablement dans les détails en ce qui concerne le thème de l’amour ?
L’évocation de la guerre pour mieux exalter l’amour
Au-delà d’un champ lexical relatif à la guerre, le décor reste planté :
« Dans le silence des vents, et les bruits des canons /Je suis là. » (Face, p. 27)
« Je te parle de quelque chose/La vie est guerre elle-même. / Et l’amour aussi. » (Souffle, p. 32)
« Mon cœur exalte ton nom dans ce monde plongé dans les ténèbres angoissantes/Je retrouve le sentier torturé qui mène à ton sourire/grâce aux étincelles des balles que ton souffle ravive. » (Souffle, p. 29)
« Quel dieu-diable a donc inventé la guerre pour mettre/autant mon cœur au supplice ! /Pour me faire chanter l’amour, /Pour me faire chanter mon cœur. » (Face, p. 24)
« Quelle guerre peut avoir raison de nos soupirs ! » (Souffle, p. 26)
« Poussant mon être à crier paix/Matin et soir/Midi et minuit » (Face, p. 28)
« Et les ruelles qui mènent à l’abri étouffées par les/crachats des canons et les morves difformes des drones. » (Souffle, p. 29)
« Je me retrouve dans nos draps/Obsédée par la peur, la crainte et l’angoisse/Mes nuits sont cauchemardesques et mes jours sans vie/L’existence qui m’entoure me paraît si loin. » (Face, p. 30)
« Mon élu, mon chevalier, /Mon soldat, mon vaillant guerrier/Parle-moi de toi et non de la guerre, /Raconte-moi ton cœur et non les canons. » (Face, pp 30-31)
« A l’aurore de ce jour couleur de vie/La trompette a sonné dans la ville (…)/Je ne rêve plus de sang/Je ne rêve plus de morts/Je rêve de toi/Chevalier de la vie/Vainqueur d’une guerre qui a vu mon cœur meurtri et /mon âme desséchée (…)/Nous sommes les survivants de la saison des amours/Nous sommes les condamnés sans souci d’une guerre en sursis/Nous sommes les âmes meurtries d’une guerre en paix.» (Face, pp. 38-39)
« Les lignes de front sont parties enfumées/Brulées dans les flammes d’un désir de retour/Aussi ardent que la foi d’un nouveau converti. » (Souffle, p. 40)
« Malgré le sang, l’horreur, la peur, l’angoisse de mes nuits/Mon cœur s’abreuve d’amour » (Face, p. 35)
« Que créent ces hommes qui remplissent leurs coupes/de champagne pour chaque vie perdue. » (Face, p. 35)
« Je ne te parle pas de la guerre de cette vie/Au milieu des feux et des larmes et du sang taché par le rire et le pôo du champagne de ceux qui célèbrent la mort. » (Souffle, p. 32)
Un peu comme pour conclure : « Je reviens/Enfin/De cette guerre des autres/Voir tes yeux de déesse/Tes lèvres de déesse/Tes doigts de déesse/Et succomber à la douceur de ta peau !/Je viens/Encore/Retrouver ton corps de déesse/Tes seins de déesse/Tes fesses de déesse/Et me perdre dans les corridors de tes reliefs ! » (Souffle, pp 40-41)
La guerre étant comme une sorte de saison d’anomie, son évocation fait véritablement installer dans la conscience collective tous les reliefs de l’amour.
Les marques d’amour entre Souffle et Face
Le contenu de l’œuvre est très attachant et l’effusion lyrique par laquelle les sentiments les plus intimes atteignent le cœur et la sensibilité de chacun est assez évidente et ceci sur les tons les plus divers :
« Souffle, tu as insufflé vie à des mots qui en moi avaient séché/Tu as fait naître en mon esprit des parfums aux /pensées de diable et d’ange/Du coup, ton nom retentit à mes lèvres comme/l’unique mélodie qui donne sens à ma vie. » (Face, p. 8)
La réponse suit en même temps :
« Ne sois pas une rose/Face/Hibiscus je te préfère (…)/Et lorsque tes lèvres font naître du rythme dans mon nom/Mes yeux brillent telle l’étoile polaire/Face mienne. » (Souffle, p. 9)
« Si seulement mon être entier pouvait baigner dans ces mots/Et leur parfum m’enivrer jusqu’au tréfonds de mon âme/Je chanterai ton nom dans toutes les langues (…)/Au rythme des cris des oiseaux/Qui chantent et Souffle et Face. » (Face, p. 10)
«Et mon nom vivra aux lèvres de ton nom/Enlacé/Croqué/Sucé/Tel un mélange de miel et de nectar dans le creux de ton nombril… » (Souffle, p. 11)
« Dans les flots impétueux de ton regard je veux me perdre/Soumise à tes baisers je me laisse choir dans tes bras (…)/Ce soir je t’accueille, soumise./Dans la splendeur de la nuit et le secret de l’obscurité,/Je t’offre mon palais, temple de délices aux douceurs couleur arc-en-ciel./Viens puiser à ma source et boire à ma fontaine,/Viens savourer les délices de cette rivière dont toi seul détiens les secrets du reflet/Perds-toi, oublie-toi, abandonne-toi,(…)/Attentive au moindre battement de ton cœur,/Dont moi seule écris la clé de chaque note. » (Face, p.12)
« Berceau de watts déchainés (…) /Blotti dans l’encoignure de tes pétales/Serre mon nom contre le nectar de tes lèvres (…) Je me mets aux soins de tes doigts/De tes lèvres. / Tu n’iras pas me trouver au bout du monde/Non/J’apporterai le monde / A toi. » (Souffle, p. 13)
« Ton étreinte attise en moi l’étincelle qui enflamme les sentiers enneigés d’ici et brûle l’hymen qui mène au camp. » (Souffle, p. 16)
« Bluffé par la tendresse de tes mots, de tes doigts, des pulpes de tes lèves aux arômes de goyave. » (Souffle, p. 19)
« Malgré la sécheresse du sol/Elle est la promesse d’un retour certain/Elle est la preuve d’un sentiment sincère. » (Face, p. 34)
« Pour sonner aux rives d’un nouvel élan/La cloche de deux cœurs à jamais unis/Plus forte/Plus vive /Plus vive/Plus intense. » (Face, p. 39)
Ces marques d’amour ne sont que des preuves qui expriment l’intensité de cet amour qui se traduit surtout dans sa manifestation corporelle et charnelle.
Des effluves de salacité
L’intensité de l’amour à distance est aiguisée au point de tomber dans la lubricité :
«Ton déhanché/Dans la fraicheur du soir. » (Souffle, p. 7)
« Au cœur de tes tréfonds/Volontiers/Je descends/Puiser de l’eau de vie/Te faire vibrer de spasmes dont seul P’tah détient le secret. (Souffle, p.11)
« Et mourir dans le miel de ton alcôve tropical/Pour revivre dans le nectar des fleurs/Dans le souffle des cœurs aux aromes de la solitude en quête/D’eau/De sel/Et de vie. » (Souffle, p. 41)
Cette évocation de la vie que vient renforcer les vocables « eau » et « sel » touche du doigt le caractère vital de l’amour.
L’usage du mode impératif dans les vers qui suivent ne fait que conforter la vitalité de ce sentiment ennobli par un champ lexical de l’eau qui est la vie :
« Viens puiser à ma source et boire à ma fontaine, / Viens savourer les délices de cette rivière dont toi seul/détiens les secrets du reflet. » (Face, p. 12)
« Guide le pèlerin au trône de ton palais/Plonge-le dans les délices de ta rivière/Que ses yeux brillent de mille feux/Qu’il se fonde dans l’arc-en-ciel qui loge dans la fente/du mur de l’amant’nation. » (Souffle, p. 13)
Il est question de formes et de figures dans toute leur diversité qui sont mises au service de l’évocation des parties intimes de l’être aimé :
« Je m’assoupis entre tes géométries/Tes cercles/Tes rect-sans-angles/Le triangle/Et ce jeu de lignes que je découvre dans la fièvre de tes délices/Je meurs dans ton abime pour revivre dans les tumultes de ton cœur en transe/Mon souffle mêlé au tien, exaltant. » (Souffle, p. 16)
Le point de chute qu’est l’acte sexuel est poétiquement exprimé dans le choix judicieux des mots :
« Quand je joue de ta guitare les rosées jaillissent de tes cieux/Pour mouiller tes pétales hibiscus/Pour étancher la soif des oiseaux de ton jardin. / Je suis là mon nectar. » (Souffle, p. 19)
« Je renais sur ton terrain fertile quand tu m’arroses des eaux de ta rivière. » (Souffle, p. 26)
« Je m’empresse d’étancher ta soif de vie/O ma déesse/D’une gourde pleine de cocktail de nectar recueilli des fleurs de mon jardin sauvage. » (Souffle, p. 33)
La poésie lyrique désigne alors une poésie dont le but principal est l’expression des sentiments personnels, les pouvoirs du langage, la possibilité d’interroger, comme dit Jacques Prévert, « les choses qui sont derrière les choses. »
Ce vocabulaire libidineux n’est que la preuve de la « manquance » qui s’est installée entre Souffle et Face.
L’absence physique de l’être aimé
Quand la distance s’installe entre les deux amoureux, c’est le vide qui prend le pouvoir :
« Si loin si proche de la tendresse de tes lèvres » (Souffle, p. 9)
« Plus loin,/Plus fort,/Plus vif,/Plus intense./Mon cœur (…) s’attriste,/Il cherche sa perle, il cherche son cristal(…)/Je le promène, mon cœur,/Dans le temps, dans l’espace, dans le vide./Triste solitude,/Fade existence,/Vil parcours,/Je cherche,/Mon cœur cherche,/Plus loin, plus vide,/Mon cœur crie,/Un cri muet,/Seul l’élu pourra l’entendre (…)/Plus tôt, plus vite. (Face, pp 20-21)
La solitude sur fond d’attente règne sur toute la ligne :
« Pourquoi es-tu si loin mon élu ?/Dans la tristesse de mes nuits, la solitude de mes jours,/Je t’espère/Dans le silence de mes mots, et le cri de tes silences,/Je t’attends/Dans le tiédeur de mon cœur et le tourment de mon âme,/Je patiente.(…)/Il m’attend » (Face, p. 24-25)
«J’ai combattu la solitude/J’ai triomphé de la tristesse/J’ai bravé les ténèbres au sabre de ta voix » (Souffle, p. 26)
« Plus courtes sont mes nuits,/Amère saveur d’un retour incertain de l’élu/Mon élu/Teintant ainsi mes désirs en soupirs/Mes soupirs en plaintes/Mes plaintes en larmes/Mes larmes en crainte (Face, p. 27)
« Mon cœur exalte ton nom dans ce monde plongé dans les ténèbres angoissantes/Je retrouve le sentier torturé qui mène à ton sourire/grâce aux étincelles des balles que ton souffle ravive. /Ma déesse si loin/Si proche/Si absente/Si présente.» (Souffle, p. 29)
«Et toi pourtant, si loin à mon corps et si près de mon cœur/Mon souffle si loin/Si proche/Si absent/Si présent.(…) Je m’accroche/Plus forte/Plus confiante/Plus assoiffée. » (Face, pp. 30-31)
« Et je reviens par les sentiers étroits qui mènent à ton village natal délivrer ton cœur de sa tristesse et ton corps de la solitude. » (Souffle, p. 32)
Cette absence de l’être aimé a des conséquences physiques et morales :
« Mon cœur saigne/Mon âme est en peine(…)/Ma vie trépidante et couleur arc-en-ciel se ternit jour après jour/L’existence perd sa valeur et m’entraîne dans sa chute. » (Face, p. 34)
« Triste solitude/Triste existence/Me laissent dans l’attente de l’élu cantor/De l’élu héros/Reviens. » (Face, p. 35)
« Je viens/Ma déesse/Repeindre ta vie de vives couleurs de nuit comme de jours./Je viens pêcher tour à tour/Les peines qui t’habitent/La peur qui t’envahit/L’obscurité qui te couvre de ses voiles lugubres, Aux filets de mes souffles enfin dégourdis/Et je les mets au repos éternel sous les braises de mes baisers. » (Souffle, p. 37)
Le vide à combler dans la vie de la personne qui aime est pourtant une véritable présence intangible.
La présence manifeste de l’être aimé
Cette omniprésence de la personne aimée est tellement lancinante :
« Si loin si proche de la tendresse de tes lèvres » (Souffle, p. 9)
« En moi,/Si présent,/Si réel/Si vrai/Si vif/Il m’attend. » (Face, pp.24-25)
« Je suis là/Berceau de watts déchainés/De ruisseaux aux souffles virevoltants/Je suis là/Blotti dans l’encoignure de tes pétales/Tire-moi/Prends-moi/Serre mon nom contre le nectar de tes lèvres/Fort/Fort » (Souffle, p. 13)
« Je suis là,/Je veille sur toi. » (Face, p. 12)
Il s’agit d’une présence envahissante sans être encombrante :
« Tu es là Souffle tu es là/Dans la fièvre de mes délires/Dans le secret de mes pensées/Dans le souffle de mon âme/Dans la danse de mes courbes/Dans l’élan de mon cœur/Dans la cadence de mes pas/Dans l’essence de mes mots/Tu es présent Souffle/Partout/Et pour tout dans ma vie. » (Face, p.15)
Cette omniprésence se manifeste dans l’expression de la possession à travers le mot éwé « nye » (adjectif possessif) :
« Je suis là,/Face nye » (Souffle, p. 17)
Le sujet, le verbe et le complément « Je suis là » restent l’incarnation de cette présence même intangible auprès de l’être aimé :
«Je suis là mon amour/Je suis là ma bien-aimée/Au milieu de tes plus profonds désirs/Pour renaître dans les rayons de ton sourire, comme l’aube/Encore et encore pour une éternité de fois./Je suis là (…)/Je suis là (…)/Je suis là mon nectar/Je suis là Face/Je suis là pour toi, à la portée de tes doigts si gracieux/A la portée de tes lèvres si tendres si salées sucrées/Je suis là avec toi pour toi et en toi..» (Souffle, p. 19) « Je suis là je t’assure (…) Tu es là (…) Je suis là. » (Souffle, p. 26)
« Dans les lointaines vallées où la vie t’emmène,/Je suis là/Dans le silence des vents, et les bruits des canons/Je suis là/Dans les froides nuits, sinistres et sans étoiles/Je suis là/Dans le regard de ceux que la vie emporte,/Dans l’émoi de ceux à qui elle fait grâce/Je suis là/Plus loin/Plus proche/Plus loin/Plus proche (…)/Plus de toi/Plus de nous/Je suis là. » (Face, pp. 27-28)
La délivrance arrive enfin au bout du petit matin :
« A l’aurore de ce jour couleur de vie/La trompette a sonné dans la ville/Adieu les jours de solitude,/Adieu les nuits sans amour/Adieu le temps des roses/Que fleurissent les hibiscus/Que renaisse la vie/Je suis là mon amour.» (Face, p.38)
«Je suis là/Dans tes bras de déesse/Tes baisers de déesse/Ta chaleur de déesse »
(Souffle, p. 41)
La présence fait instaurer un dialogue entre les deux tourtereaux Souffle et Face :
Un dialogue s’installe entre les deux amoureux
« Je t’ai vue l’autre fois/Face » (Souffle, p. 7). Il y a même une sorte d’interpellation, d’invitation ou d’invite : « Viens mon Souffle/Viens mon héro (…)/Viens mon souffle/Viens/Ce soir je t’accueille, soumise. » (Face, p. 12)
« Face/Face/Face mienne » (Souffle, p. 9) ; « Face nye » (Souffle, p. 11)
« Souffle, tu as insufflé vie à des mots qui en moi avaient séché » (Face, p. 8)
« Face mon hibiscus (…)/Face/Face » (Souffle, p. 16)
« Souffle/Souffle/Souffle… » (Face, p. 10)
« Qui es-tu,/Beau Souffle/Viens mon amour/Viens mon héro/Viens mon Souffle » (Face, p. 18) ; « Il l’entend,/Il y répondra. » (Face, p. 21)
« Je viens à ta rencontre » (Souffle, p. 26)
« Plus de toi/Plus de nous/Je suis là/Viens à ma rencontre » (Face, p. 28)
« Tu vois la rose qui jubile au milieu de notre jardin/Tu vois cette rose ?/Fauche-la/Fauche-la (…)/Fauche-la/Fauche-la/Et mets à sa place l’hibiscus aux petits soleils jaunes » (Souffle, pp. 36-37)
« Nous sommes nous/Souffle/Face/Plus passionnés/Plus vivants/Plus fous/Plus insouciants/Plus rock/Plus nous/Plus Souffle/Plus Face. » (Face, p. 39)
Ce dialogue a lieu dans un environnement ayant comme témoins les éléments de la nature.
Sentiment de la nature et du cosmos
Il est impossible de détacher le sentiment amoureux de son cadre d’expression qui reste et demeure l’entièreté de son enveloppe naturelle :
« La lune dans ton sourire/La chaleur de ton cœur (…)/Dans la fraicheur du soir/Tout fait du bien aux papillons, aux pistils brûlés hier soir. » (Souffle, p. 7)
« Et en toi l’univers va éclore pour engendrer de myriades de galaxies vibrant aux pas de ton cœur, /Aux couleurs de tes yeux,/A l’allure de ton souffle, Face » (Souffle, p. 14)
Le changement de saisons, le temps chronologique, le temps météorologique et climatique sont les témoins évidents de l’amour :
« Lorsque le voile de la nuit s’est abattu sur mon corps,/Et que Neith dans son élan m’a entraînée au pays des rêves (…)/Même si la neige devient flamme, et la pluie grêle/Nous y serons/Chez nous. » (Face, p. 15)
Les différentes composantes de l’environnement s’expriment dans l’exaltation du sentiment amoureux :
« Au rythme des cris des oiseaux, Qui chantent et Souffle et Face, Je soulèverai les sables que me servent les vagues. » (Souffle, p. 10)
« Me promener dans les sables de ton regard/Me baigner dans le ruisseau de ton sourire/Me couvrir de tes baisers si tendres si chocolat truffés de ginseng d’Inde. »
(Souffle, p.11)
« De ruisseaux aux souffles virevoltants (…)/Blotti dans l’encoignure de tes pétales » (Souffle, p. 13)
Les astres également sont au rendez-vous, tels de fidèles témoins du sentiment amoureux :
« Quand tu donnes le sourire au soleil qui me fait piaffer dans ton monde. » (Souffle, p. 17)
« Pour renaître dans les rayons de ton sourire, comme l’aube » (Souffle, p. 19)
« Je viens à ta rencontre,/Mes yeux pleins d’étoiles. » (Souffle, p. 26)
« Viens à ma rencontre/Nos yeux pleins d’étoiles. » (Face, p. 28)
« Les champs d’ici faits de jonquilles (…)/Tu sèmes la paix à tous cieux/Du sud du nord/De l’ouest de l’est (…)/Nos têtes couvertes de mille étoiles. » (Souffle, p. 29)
« Les rues d’ici sont aux éclats du soleil/Les sentiers de nos longues promenades nocturnes portent ton parfum/Mon cœur exalte ton nom dans ce monde,/Couleurs de vie,/Pourtant gris en mon âme » (Face, p. 30)
La nature et ses différentes composantes s’expriment chacune dans son langage propre à elle :
« Par ici,/J’ai vu des fleurs embrasser la tendresse de ce vent léger fauchées à la vie. (…)/J’ai vu des dizaines de papillons emporter mon cœur et le plonger dans une coupe de nectar d’hibiscus souvenir des délices de tes lèvres. » (Souffle, p. 32)
« Porté sur les ailes de tes souffles courts couleur arc-en-ciel » (Souffle, p. 33)
« Mais dans notre jardin la rose au milieu garde toujours sa beauté et son éclat/Elle résiste aux ouragans de la vie et à la tristesse du temps/Malgré la sécheresse du sol. » (Face, p. 34)
« Je vole à ta rencontre/Telles les vagues qui giclent sur la berge nue (…)/Repeindre ta vie de vives couleurs de nuit comme de jour (…)/L’obscurité qui te couvre de ses voiles lugubres/(…) Tu vois la rose qui jubile au milieu de notre jardin/Lorsque passe l’ouragan/Pendant que s’assèche le sol/Tu vois cette rose ? (…)/ Et que le vent emporte son parfum au-delà du lointain/ Les rêves d’autrui suspendus à des épines, morts-nés, /Car elle n’augure que de l’incertitude et ne berce que l’amertume.» (Souffle, p.36)
« A l’aurore de ce jour couleur de vie(…)/A l’aurore de ce jour couleur de vie » (Souffle, p. 38)
« L’aurore glisse avec le crépuscule en chambre/Dans un lit douillet garni de pétales d’hibiscus/Et ils enfantent nos cœur ensevelis l’un dans l’autre. » (Souffle, p. 40)
John Keats recentre le débat poétique en ces termes :
« La poésie doit nous surprendre par son excès délicat, et non parce qu’elle est différente. Les vers doivent toucher notre frère comme si c’était ses propres mots, comme s’il se souvenait de quelque chose, dans la nuit des temps, il connaissait déjà dans son cœur. La beauté d’un poème n’est pas dans la capacité qu’il a de faire plaisir au lecteur. La poésie est toujours une surprise, capable de nous couper la respiration à certains moments. Elle doit demeurer dans nos vies comme le coucher de soleil : miraculeux et naturel en même temps. »
Vingt-trois poèmes au total dont douze de Patron Henekou et onze de Kokoè Essénam Kouévi. Chaque voix est unique dans la manière d’exprimer ces thèmes communs : des méditations inspirées par le sentiment de la nature, l’inévitable créature de Dieu qu’est la femme, mais sans doute l’amour, mêlé d’ailleurs à tous les thèmes ici évoqués, qui reste le thème privilégié dans ce recueil de poèmes. Il s’agit après tout d’un échange de sentiments dialogués entre deux personnages : Souffle et Face, assez original dans sa forme. Le recueil rassemble des vers ponctués d’images, de couleurs, de formes et de mots qui donnent une allure de délire à la quête de la beauté, du rêve et de l’amour. La poésie est une création artistique essentiellement centrée sur elle-même, un puissant outil de dénonciation et une traduction des sentiments personnels. Siège des sentiments, le cœur devient ainsi la source principale d’une inspiration féconde. Ainsi Octavio Paz reconnait « Les hommes se servent des mots ; le poète les sert ».
Adama AYIKOUE, Critique
Lire aussi: FESTILARTS 5/ Sous le signe de la poésie en langues nationales