Faire du foncier un allié de la productivité agricole, justifie la tenue de la 6ème session ordinaire du Comité consultatif national (CCN), couplée au colloque scientifique sur la question foncière. Organisé, ce vendredi 31 janvier, dans le cadre du Projet de réforme foncière pour l’accroissement de la productivité agricole (LRAP), ce rendez-vous a réuni chercheurs, praticiens et décideurs pour une réflexion approfondie.
Dès l’ouverture des travaux, le ton a été donné par le président de l’Université de Lomé, Pr Adama Kpodar, qui a insisté sur l’importance de la thématique : « Les questions relatives à la terre sont donc des questions de vie et de mort. Elles embrassent l’existence humaine dans son tréfonds comme peut l’induire l’attachement à la terre natale, au pays natal. Ce sont des questions d’une gravité extrême eu égard aux problèmes existentiels qu’elles génèrent et aux quels les réponses impérieuses doivent être trouvées sur le sol togolais, la Terre de nos aînés. »
Un enjeu au cœur des tensions sociales
Le foncier constitue l’un des principaux foyers de tensions au Togo, tant en milieu urbain que rural. « On parle de 80 % du contentieux judiciaire lié à la terre. Que ce soit en ville ou dans les campagnes, les conflits fonciers menacent le vivre-ensemble et la cohésion nationale », a souligné un intervenant. Face à cet enjeu de stabilité sociale, la réforme foncière, amorcée avec l’adoption du Code foncier et domanial en 2018, cherche à garantir plus de transparence et d’équité dans la gestion des terres. Toutefois, comme l’a rappelé le chef canton d’Aflao Gakli, Togbui Djidjolé Detu X, sa mise en œuvre effective nécessite des mesures adaptées aux réalités du terrain.
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Le projet LRAP : une approche pragmatique
Le Projet de réforme foncière pour l’accroissement de la productivité agricole (LRAP), financé par la Millennium challenge corporation (MCC), vise à élaborer des décrets, des manuels et des guides facilitant l’application du Code foncier, notamment pour les terres rurales coutumières. Son objectif est de : « promouvoir les sociétés paysannes pour l’accroissement de la productivité agricole », selon Johnson-Ansah Ampah, enseignant-chercheur et membre du CCN. Car sans une sécurisation foncière efficace, les agriculteurs hésitent à investir et à mettre en valeur leurs terres, freinant ainsi le développement rural.
Un colloque interdisciplinaire pour des solutions concrètes
Pour relever ces défis, le colloque a rassemblé des experts de divers horizons : sociologues, juristes, magistrats, notaires et huissiers. Le caractère interdisciplinaire de l’événement a été souligné par les organisateurs : « Les problèmes fonciers ont besoin d’une réflexion approfondie qui dépasse l’ordre des connaissances d’une seule discipline, quel que soit le niveau de maîtrise que l’on peut avoir », a rappelé Johnson-Ansah Ampah.
Au programme des discussions sur la multiplicité des ventes de terrains, l’acquisition des titres fonciers, la question des expulsions, ou encore la gestion des réserves administratives. L’un des axes clés abordés a été la sécurisation des relations entre métayers et propriétaires, essentielle pour une exploitation durable des terres.
Des perspectives encourageantes
Ce colloque marque une étape cruciale dans la volonté des autorités togolaises de régler, une fois pour toutes, la question foncière. L’implication de l’Université de Lomé et des différents acteurs du secteur montre que la dynamique est en marche. « Notre présence ici traduit cette volonté de dialogue et de co-construction avec le monde universitaire », a réaffirmé Togbui Djidjolé Detu X. Cette approche multidisciplinaire va contribuer à la sécurisation du foncier mais aussi au développement agricole pour une meilleure cohésion sociale
Si les débats ont été riches et les propositions nombreuses, le chemin vers une réforme pleinement opérationnelle reste semé d’embûches. Mais avec de tels cadres d’échanges et une prise de conscience collective, le Togo est sur la bonne voie pour assurer un avenir foncier plus sécurisé et prospère pour tous.