Dette publique : Lomé, capitale d’un sursaut africain pour une nouvelle doctrine des emprunts

L’Afrique s’est donnée rendez-vous pour repenser l’un de ses fardeaux les plus lourds : la dette publique. Ce 12 mai 2024, la Conférence de l’Union africaine sur la dette publique s’est ouverte à Lomé au Togo. Le thème est évocateur : « L’Agenda africain de gestion de la dette publique en matière de restauration et de préservation de la viabilité de la dette ».

Derrière les murs sobres du centre de conférence, une volonté claire s’est dessinée : sortir de la résignation et bâtir une vision panafricaine de la souveraineté budgétaire. À l’ouverture, Faure Gnassingbé, président du Conseil togolais, a prononcé un discours à la fois incisif et visionnaire, véritable manifeste pour une « doctrine africaine renouvelée en matière de dette ».

La dette n’est plus un risque, c’est une « crise silencieuse mais structurelle ». Vingt pays africains sont en détresse financière. Et en 2024, le continent aura déboursé plus de 160 milliards de dollars pour le seul service de la dette; plus que les budgets cumulés de la santé et de l’éducation. Faure Gnassingbé dénonce une injustice criante : « Ce n’est pas une fatalité économique, c’est le résultat d’un système pensé ailleurs, pour d’autres priorités. »

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Face à cette camisole budgétaire, le Togo plaide pour une refonte des critères de viabilité. L’endettement ne doit plus être perçu comme un mal en soi, mais comme un levier de développement. Encore faut-il l’encadrer et l’orienter vers des investissements porteurs. Une position audacieuse, face à une orthodoxie économique souvent dictée depuis l’extérieur.

Autre pilier du discours : la sécurité. À l’heure où plusieurs pays africains luttent contre le terrorisme, les dépenses militaires restent ignorées dans les analyses de soutenabilité. « Une dette est-elle soutenable si elle empêche un État d’assurer la sécurité de ses citoyens ? », s’interroge Faure Gnassingbé. Il appelle à reconnaître ces dépenses comme des biens publics mondiaux.

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Mais l’Afrique ne veut pas quémander. Elle revendique une place à la table des grandes décisions. « L’Afrique n’est pas en quête d’assistance, elle est en quête de marges de manœuvre. » D’où l’appel à une coordination macroéconomique régionale et à une voix unie dans les forums internationaux.

La Conférence de Lomé, bien plus qu’un sommet technique, pourrait marquer le début d’un basculement. Celui d’un continent qui ne veut plus seulement gérer sa dette, mais redéfinir sa destinée.

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