Récépissé N° 0010 / HAAC / 12-2020 / pl / P

Ce qu’il faut savoir sur la tentative de coup d’Etat déjouée au Bénin

Le gouvernement béninois a annoncé dimanche qu’une mutinerie avait été déjouée à Cotonou, capitale économique et plus grande ville du pays, après que des soldats armés ont pris le contrôle de la télévision publique pour déclarer la destitution du président Patrice Talon.

Comment un pays longtemps considéré comme stable en Afrique de l’Ouest en est-il arrivé à faire face à une telle menace ? Quelles sont les causes et comment les différentes parties ont-elles réagi ?

Que s’est-il passé ? 

Dimanche matin, un groupe de soldats se présentant comme le « Comité militaire pour la refondation » s’est réuni et a proclamé que M. Patrice Talon est démis de ses fonctions de président de la République.

Des tirs ont été signalés au camp Ghezo, près de la résidence présidentielle à Cotonou, et les soldats ont pris le contrôle de la chaîne publique Benin TV, où ils ont déclaré que le président avait été « démis de ses fonctions », selon des médias locaux. La présidence a toutefois assuré que le chef de l’Etat était sain et sauf et que les forces gouvernementales avaient rétabli la situation.

Les forces armées béninoises ont déjoué une tentative de mutinerie visant à déstabiliser l’Etat et ses institutions, a indiqué le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique, Alassane Seidou, dans un communiqué publié dimanche.

Selon le ministre, les forces armées et leur commandement, « fidèles à leur serment », ont réagi de manière républicaine et ont pu maîtriser la situation, correspondant à la tentative de se concrétiser. Le gouvernement a appelé la population à poursuivre normalement ses activités.

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Dans un entretien accordé dimanche au magazine panafricain francophone Jeune Afrique, le ministre béninois de l’Economie et des Finances, Romuald Wadagni, a également affirmé que la situation était « sous contrôle ». « Les mutins sont encerclés.

Nous sécurisons la zone, mais ce n’est pas encore totalement terminé. Nous sommes en sécurité », a-t-il assuré, ajoutant que des hélicoptères patrouillaient la ville et que les forces armées avaient fortement sécurisé le centre de Cotonou.

La Commission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a indiqué dimanche avoir ordonné le déploiement de la force en attente de la CEDEAO au Bénin. Cette force, composée de troupes du Nigeria, de la Sierra Leone, de la Côte d’Ivoire et du Ghana, assistera le gouvernement béninois dans le maintien de l’ordre constitutionnel et de l’intégrité territoriale du pays.

La présidence nigériane a annoncé que, sur demande de Cotonou, le président Bola Ahmed Tinubu avait ordonné aux forces armées nigérianes d’aider le Bénin à déloger les putschistes et à protéger ses institutions. Avec l’appui du Nigéria, les forces béninoises ont repris le contrôle de la situation et ont délogé les putschistes de la télévision nationale, a précisé la présidence.

Des habitants ont indiqué par téléphone à Xinhua que des soldats armés avaient été déployés aux principaux carrefours de Cotonou et de ses environs. Les activités quotidiennes se poursuivaient normalement et les grands marchés restaient ouverts.

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Situé en Afrique de l’Ouest, le Bénin couvre environ 112.000 km² et compte quelque 14 millions d’habitants. Considéré historiquement comme l’un des pays les plus pacifiques et stables de la région, le Bénin a cependant connu plusieurs coups d’État et tentatives depuis son indépendance de la France en 1960.

Patrice Talon est arrivé au pouvoir en mars 2016 et a été réélu en avril 2021. Il devait quitter ses fonctions après l’élection présidentielle d’avril 2026. Romuald Wadagni était largement considéré comme le favori pour suc luicéder, tandis que l’opposant Renaud Agbodjo avait été écarté par la Commission électorale pour raison de parrainages insuffisants.

Concert de réactions 

Le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, s’est dit profondément préoccupé par la tentative de prise de pouvoir inconstitutionnelle au Bénin, a déclaré dimanche son porte-parole, Stéphane Dujarric. « Le Secrétaire général condamne fermement toute tentative de saper la gouvernance démocratique au Bénin, qui pourrait également menacer davantage la stabilité de la région », a affirmé M. Dujarric.

Le président de la Commission de l’Union africaine (UA), Mahmoud Ali Youssouf, a « ferment et sans équivoque » condamné la tentative de coup d’État militaire au Bénin. « Toute forme d’ingérence militaire dans les processus politiques constitue une grave violation des principes et valeurs fondamentales de l’Union africaine », a rappelé le président de la Commission dans un communiqué.

M. Youssouf a appelé tous les acteurs impliqués à cesser immédiatement toute action illégale, à respecter pleinement la Constitution du pays et à regagner sans délai leurs casernes et leurs obligations professionnelles légitimes. Il a également exprimé sa « profonde préoccupation face à la prolifération inquiétante des coups d’État et tentatives de coups d’État dans certaines régions du continent », soulignant que ces actions compromettent la stabilité africaine, menacent les acquis démocratiques et encouragent les acteurs militaires à agir en dehors des cadres constitutionnels.

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La CEDEAO, dans un communiqué publié à Abuja, la capitale nigériane, s’est dite « consternée » par la tentative de mutinerie et a déclaré avec force cette action inconstitutionnelle, la décrivant comme une subversion de la volonté du peuple béninois. Le bloc régional a appelé au plein respect de la Constitution, Saluons les efforts du gouvernement et de l’armée républicaine pour ramener la situation sous contrôle, et tenons les auteurs de la tentative pour responsables de toute perte humaine ou matérielle.

La CEDEAO a indiqué qu’elle « soutiendra le gouvernement et le béninois par tous les moyens nécessaires, y compris un éventuel déploiement de sa force en attente régionale, afin de défendre la Constitution et l’intégrité territoriale du pays ».

Xinhua

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