La théorie de zone monétaire optimale est un concept qui décrit « les conditions dans lesquelles une zone géographique gagne à adopter une monnaie unique ». Ce concept peut être aussi utilisé « lorsqu’un pays choisit d’aligner le taux de change de sa monnaie sur celle d’un autre pays ». Dr Aliou Niang Fall, enseignant- chercheur en ingénierie financière et Dr Moussa Diop, enseignant-chercheur en économie monétaire et financière, ont dans un article publié sur financialafrik, analysé cette théorie dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa).
« Dans le cadre de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), où le francs CFA est arrimé à l’euro, la théorie des ZMO semble très appropriée pour évaluer les avantages et les inconvénients d’une telle expérience d’intégration monétaire adoptée depuis 1962. Il s’agit d’une préoccupation légitime d’autant plus que les autorités politiques et monétaires ont annoncé une «nouvelle» coopération avec la France à savoir la mise en place future de l’ECO (diminutif d’Ecowas, terme anglais désignant Cedeao) », mentionnent Dr Aliou Niang Fall et Dr Moussa Diop dans l’article.
« L’on pourrait se demander après plus de 50 ans d’expérience, si la mise en place de la zone-franc est optimale ou a un sens ? Est-ce qu’avec l’avènement de la nouvelle monnaie Eco, la tendance va changer à savoir renoncer au lien institutionnel entre notre politique monétaire et celle de la Banque Centrale Européenne ? Est-ce qu’avec l’avènement de cette monnaie, les pays de l’Union auront une autonomie par rapport à l’instrument monétaire ? Est-ce qu’elle va permettre de répondre aux besoins spécifiques des pays membres de l’UEMOA ? », s’interrogent-ils.
« Le scénario qui prévaut dans l’Uemoa aujourd’hui est celui qui prévalait en 1914 avec le système d’Etalon-or c’est-à-dire la mise en place d’un système de change fixe (parité fixe FCFA/Euro) et la libre circulation des capitaux. Cependant, la zone renonce à son autonomie monétaire (indépendance monétaire et financière). Avec ce scénario, la banque centrale ne dispose pas assez d’autonomie en matière de politique monétaire même si elle adopte des taux d’intérêt afin que le taux de change reste stable (1 Euro = 655,957 FCFA). Il existe un autre scénario présenté de la façon suivante : renoncer à la parité fixe en adoptant un système de change flottant pour bénéficier d’une autonomie monétaire et d’une libre circulation des capitaux. C’est le système qui prévaut maintenant depuis 1973 dans les grandes banques centrales (FED, BCE). Ainsi, la banque centrale peut intervenir librement en matière de politique monétaire et baisser ou relever les taux d’intérêts en fonction de la conjoncture économique. Ce que la Bceao peine à mettre en œuvre à cause du système de change fixe et du lien institutionnel avec la BCE », constatent-t-ils.
« En définitive, nous dirons que pour disposer d’un pouvoir ou d’une autonomie monétaire, il faudra que les pays de l’Uemoa adoptent leur propre monnaie nationale ou une monnaie unique avec une parité flexible. Ce qui leur permettrait d’avoir assez d’instruments pour pouvoir répondre de façon efficace aux chocs exogènes comme le cas au quel nous assistons à savoir, la crise sanitaire de la Covid-19 qui s’est découlée sur une crise économique, et donc un système économique chaotique », concluent-t-ils.