Sans monnaie commune, l’Afrique continuera de « se priver de sa propre puissance économique ». C’est la substance des propos tenus par le Prof. Kako Nubukpo au deuxième jour du 9ᵉ Congrès panafricain de Lomé. L’économiste togolais a ainsi plaidé pour la mise en place d’une monnaie africaine, jugeant cette réforme indispensable pour transformer l’intégration économique du continent.
Face à un public attentif, il a d’abord rappelé l’impact du statu quo monétaire. Selon lui, l’absence de monnaie commune freine les ambitions commerciales du continent. « La première raison, c’est pour amplifier nos échanges. Il nous faudrait une monnaie africaine pour amplifier ce que nous attendons de la mise en place de la Zone de libre-échange continentale », a-t-il déclaré. Pour lui, sans un instrument monétaire partagé, le marché africain restera fragmenté.
Kako Nubukpo voit également dans cette réforme un moyen d’élever la compétitivité africaine. « Il nous faut une monnaie qui nous permet de damer le pion au reste du monde », a-t-il ajouté, exposant un objectif stratégique : donner aux économies africaines les moyens de rivaliser d’autres monnaies sur la scène mondiale.
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L’enjeu dépasse le commerce. Pour l’économiste, la monnaie commune serait un outil décisif pour absorber la pression démographique à venir. « Nous avons besoin d’une monnaie pour financer l’arrivée sur le marché du travail africain de 600 millions de jeunes dans les 40 prochaines années », a-t-il expliqué. L’idée est précise : sans innovation monétaire, les défis sociaux risquent de dépasser les capacités des États.
Dans ce paysage, l’Afrique de l’Ouest avance lentement. Les réformes du FCFA, notamment à la Bceao, ont apporté quelques ajustements. Mais l’Eco, monnaie régionale souvent annoncée, reste hors de portée. Les divergences économiques et politiques retardent encore sa naissance.
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Pour dépasser ces blocages, l’économiste appelle à une approche continentale. Il propose la création d’une banque centrale africaine tournée vers le financement du développement. « Nos États ont besoin de ressources. Il nous faut une banque centrale qui finance les États », a-t-il insisté.
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À cette architecture, il ajoute un Fonds panafricain alimenté par une hausse raisonnable des recettes fiscales. « Si nous faisons l’effort d’augmenter notre pression fiscale à hauteur de 2 % du PIB africain, nous n’aurons plus besoin de l’aide », a-t-il affirmé.
L’idée séduit par son audace mais impose un défi de taille : rassembler plus de 50 pays autour d’une même vision. À Lomé, pourtant, le débat a trouvé un écho favorable pour un continent émancipé.