Sous couvert de faire la lumière sur la situation sécuritaire au nord du Togo, le rapport récemment publié par la Fondation Konrad Adenauer Stiftung (KAS) dresse un tableau excessivement sombre des Savanes. Pourtant, à l’aune d’initiatives structurantes comme l’opération militaire Koundjoaré et le Programme d’urgence de renforcement de la résilience et de la sécurité des communautés (PURS), il apparaît évident que ce rapport passe sous silence des réalités pourtant essentielles pour qui veut comprendre la réalité sur le terrain. Et il suffit de voir la mobilisation des partenaires internationaux retroussant les manches chaque jour aux côtés des autorités togolaises pour toucher du doigt la détermination contenue dans cette profession de foi du président Faure Gnassingbé : « aucune portion du territoire ne sera cédée aux « bandes armées (…) Nous mettrons tout en œuvre pour défendre la patrie agressée. (…) nous aurons raison des forces du mal. Ces forces seront défaites aux portes du Togo ».
En effet, intitulé « Une ligne de front avec le djihadisme tracé dans le sable du Sahel : les populations du nord du Bénin et du Togo attendent une solution », le rapport signé par Mathias Khalfaoui évoque dès les premières lignes « une insécurité augmentant sans cesse » dans le nord du Togo. Une affirmation qui, à la lumière des faits, ne résiste pas à l’analyse.
Une armée debout, un territoire maîtrisé
Depuis 2018, l’opération Koundjoaré déployée par les forces armées togolaises a permis de contenir les incursions terroristes et de sécuriser les zones frontalières. Plus de cinq ans après les premières attaques, aucune portion du territoire togolais n’est tombée aux mains des groupes armés. Ce constat, qui témoigne de la résilience et de la combativité de l’armée nationale, ne figure nulle part dans le rapport. Un oubli troublant.
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Plus encore, les récentes offensives de l’armée togolaise ont infligé d’importants revers aux groupes terroristes. Ce tournant stratégique, reconnu sur le terrain par les populations elles-mêmes, est totalement ignoré. Pourquoi ce silence ? Pourquoi ce malaise à reconnaître que le Togo tient bon là où d’autres ont plié ? Lorsqu’on prétend dresser un diagnostic objectif, l’honnêteté intellectuelle impose de reconnaître les efforts et les résultats, même s’ils contredisent une ligne narrative préétablie.
Cohésion sociale : entre caricature et réalité
Le rapport affirme également que « la cohésion sociale est en déclin » et que « les conflits intercommunautaires s’intensifient ». Une lecture sans nuance qui confond tensions localisées et effondrement du tissu social. Car oui, les défis existent — pauvreté, pression foncière, insécurité — mais le Togo y répond avec méthode et détermination.
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Depuis 2022, le PURS, mis en œuvre sous l’impulsion du chef de l’État, démontre une volonté claire : celle de construire la paix par le développement. Grâce aux ressources mobilisées par l’État et l’appui des partenaires techniques et financiers, ce programme transforme concrètement la vie des communautés. En deux ans :
- 80 000 personnes ont eu un meilleur accès à l’eau potable, portant le taux de couverture de 64 % à 73,5 % ;
- L’électrification rurale est passée de 22 % à 27 % ;
- 10 grands ponts entièrement construits, 282 ponceaux et environ 260 km de pistes aménagées ;
- Des bâtiments scolaires dotés de cantine pour la plupart construits contribuant à faire passer le taux de scolarité à près de 99 % ;
- Plusieurs zones agricoles aménagées planifiées réalisées au profit des populations de la Savanes ;
- Plusieurs unités de soins périphériques construites ou réhabilitées ;
- Des milliers de crédits octroyés aux populations ;
- Des centaines de localités électrifiées ;
- Plus de 21 000 tonnes d’engrais ont été distribuées, soutenant la production agricole et la résilience alimentaire…
Ce ne sont pas de simples statistiques, mais les signes tangibles d’un État qui agit, construit, soigne et protège. Réduire cet élan à de simples promesses ou l’ignorer complètement revient à trahir la vérité du terrain.
Une méthodologie discutable et des biais manifestes
Le rapport s’appuie sur 274 entretiens réalisés dans des zones dites sensibles. Un échantillon limité, dans un contexte complexe, dont les conclusions générales posent question. De plus, il est bon de rappeler que la Fondation KAS a quitté le Togo dans les années 1990, et sa distance prolongée avec le pays interroge la profondeur de son analyse. La recherche du sensationnalisme semble avoir prévalu sur l’exigence de rigueur.
L’objectivité ne se proclame pas, elle se construit. Et en l’occurrence, la méthodologie employée semble céder le pas à l’approximation et à l’alarmisme. En amplifiant les difficultés sans reconnaître les efforts déployés, le rapport sacrifie la justesse sur l’autel d’une dramaturgie analytique.
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Rigueur, nuance et responsabilité
Les défis dans les Savanes sont bien réels. Personne ne les nie. Ils sont complexes, multidimensionnels et urgents. Mais les grossir à dessein, ignorer les progrès, et suggérer sans preuves, c’est desservir la cause même que l’on prétend défendre. Le Togo ne réclame pas des éloges ; il attend de la rigueur. Pas des projecteurs dramatiques, mais une lumière juste. Car ce sont les populations elles-mêmes, au quotidien, qui portent la charge de cette guerre silencieuse contre le terrorisme. Et elles méritent mieux qu’une analyse biaisée.
Mais au fond, quelle est la contribution attendue d’une fondation comme Konrad Adenauer Stiftung dans un contexte aussi sensible que celui du nord du Togo ? Face à la montée du terrorisme, relayer une rhétorique alarmiste et unilatérale qui affaiblit la légitimité des États revient à offrir, consciemment ou non, une caisse de résonance aux narratifs des groupes armés. Au lieu de salir les efforts d’un pays qui résiste courageusement à la violence, cette fondation, forte de son expérience et de son réseau, ne devrait-elle pas plutôt contribuer à la lutte contre le terrorisme, à la promotion de la stabilité et à l’appui aux dynamiques locales de résilience ? À la lecture de ce rapport, une question essentielle se pose : que cherchent véritablement les auteurs, et pour qui travaillent-ils ?