Après presque 50 ans d’histoire d’amour, de destinée et de vision commune, la Cédeao se disloque. Le divorce forcé voulu par les pays de l’AES est désormais officiellement consommé à partir de ce 29 janvier. A contre cœur, les 12 pays restants de la Cédeao sont obligés de faire cavalier seul. Ce tournant politique majeur soulève de nombreuses interrogations sur l’avenir de la coopération régionale. Pourtant, loin de fragiliser l’organisation, ce départ met en lumière sa résilience et sa capacité d’adaptation.
Malgré les tentatives de médiation pour qu’ils puissent se raviser de quitter la Cédeao, le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont restés de marbre. Désormais, ils ne sont plus membres de la Cédeao. Bien que présentée comme un acte de souveraineté par les dirigeants de l’Alliance des États du Sahel (AES), cette rupture constitue un pari risqué pour ces trois pays. Depuis sa création, la Cédeao a joué un rôle clé dans la stabilité et le développement économique de la Région. Son cadre institutionnel offrait aux États membres des avantages considérables : la libre circulation des personnes et des biens, l’accès à un marché commun, les juridictions communautaires ainsi que les mécanismes de médiation et soutien en matière de sécurité.
Désormais, le Burkina Faso, le Mali et le Niger devront composer sans ces acquis. Leur sortie de l’organisation pourrait accentuer leur isolement diplomatique et compliquer la coopération régionale, notamment dans la lutte contre le terrorisme. Même si ces dernières années, les pays de l’AES ont pris en main leur destin sécuritaire, des synergies à l’échelle communautaire restent de meilleures solutions contre l’extrémisme violent favorisé par la porosité des fontieres transnationales.
La Cédeao maintient le cap
Face à ce défi inédit, la Cédeao a opté pour une posture mesurée. Plutôt que d’entrer dans une escalade politique, l’organisation a pris acte de la décision de départ tout en annonçant des mesures transitoires pour limiter les perturbations économiques et sociales. Cette approche pragmatique témoigne de sa solidité et de son attachement à ses principes fondateurs.
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Contrairement aux discours alarmistes, ce départ ne signe pas la fin de la communauté ouest-africaine. Bien au contraire, elle est l’occasion d’une remise en cause sur ses faiblesses. En ce qui concerne ces dernières, l’ingérence des puissances étrangères et une amélioration continue de la liberté de circulation dans l’espace demeurent des constantes des préoccupations communautaires. Parvenir à un Cédeao des peuples et non à un syndicat des chefs d’Etats, sont au cœur des challenges de la Cédeao actuelle. Toutefois, il y a lieu de remarquer que la Cédeao demeure la principale plateforme d’intégration économique et politique de l’Afrique de l’Ouest, soutenue par des institutions solides et un cadre juridique éprouvé. Loin d’être affaiblie, la Cédeao continue d’incarner un modèle d’intégration unique en Afrique, basé sur la libre circulation des personnes et des biens, la coopération économique et la stabilité politique.
L’AES : une alternative encore peu certaine
Si l’Alliance des États du Sahel entend se positionner comme une nouvelle force régionale, son avenir reste sujet à réflexion. Déployant sa vision au fur et à mesure, la véritable stratégie politique et économique reste à clarifier. Portée par des régimes militaires, l’AES demeurent une communauté dont l’unité pourrait changer avec l’arrivée d’un probable gouvernement civil.
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Au contraire, la Cédeao peut continuer par s’appuyer sur près d’un demi-siècle d’expérience et une reconnaissance internationale qui lui confèrent un poids considérable. Là où l’AES doit encore prouver sa viabilité, la Cédeao poursuit son travail avec constance et ambition. Son défi est de prouver que l’intégration régionale est un levier de prospérité, bien plus qu’une simple alliance politique conjoncturelle.