Depuis quelques années, le secteur bancaire togolais est en pleine transformation. Face aux défis structurels et à la fragilité de certaines institutions financières, notamment l’Union togolaise de banque (UTB) et IB Bank, ex-BTCI, l’État a pris des mesures ambitieuses pour restaurer la confiance et renforcer la stabilité économique.
Représentant à elles seules 20 % des actifs du secteur bancaire togolais, le gouvernement togolais a lancé une vaste opération de restructuration impliquant deux établissements majeurs. Il s’agit de l’Union togolaise de banque (UTB) et l’ex-Banque togolaise pour le commerce et l’industrie (BTCI), désormais IB Bank. L’État a ainsi racheté les immeubles abritant leurs sièges sociaux, une transaction dont le coût est estimé à 31 milliards FCFA pour l’UTB seule. Un investissement colossal qui traduit l’urgence de stabiliser ces banques, mais qui alourdit également la dette publique.
L’UTB : une renaissance en cours
L’UTB a longtemps souffert d’une situation financière critique, plombée par des fonds propres négatifs. Grâce à l’acquisition de son siège et une injection de 12,6 milliards FCFA de capital supplémentaire, l’institution commence à redresser la barre. Un audit indépendant indique que la banque s’approche désormais des normes de fonds propres imposées par la Commission bancaire de l’Uemoa, précise une source proche du dossier. Toutefois, le chemin reste semé d’embûches. Un plan de restructuration doit être adopté avant avril 2025, avec une mise en œuvre totale prévue pour octobre. D’ici là, l’UTB restera sous contrôle public, avant une probable privatisation, encouragée par le FMI afin de « réduire les risques fiscaux à long terme ».
IB Bank : une stabilisation en demi-teinte
Privatisée en 2021 et reprise par l’homme d’affaires burkinabè Mahamadou Bonkoungou, IB Bank affiche des performances en dents de scie. La vente de son ancien siège a permis d’améliorer sa situation financière, mais les défis persistent. Un plan de réforme est actuellement en discussion avec la Commission bancaire, prévoyant « une augmentation de capital via des sources privées et l’élimination des prêts liés à des parties affiliées ».
Malgré ces turbulences, la banque semble retrouver un certain équilibre. Après plusieurs années de pertes, elle a renoué avec les bénéfices en 2024, soutenue par des reprises de provisions et une réorientation de ses engagements vers des secteurs plus sûrs. Mais sans une injection de fonds privés conséquente, sa viabilité reste fragile.
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La stabilisation de ces banques a un coût considérable pour l’État. Le budget 2024 prévoit une enveloppe de 69 milliards FCFA pour ces opérations, soit 1,5 % du PIB. Une charge qui pourrait accentuer le déficit public, déjà sous tension. Au-delà des chiffres, c’est toute la gouvernance bancaire qui est en jeu. Deux autres banques, représentant 9 % des actifs du secteur, ne respectent plus certaines normes prudentielles. L’une d’elles dépasse les limites sur les actifs non opérationnels, tandis que l’autre enfreint les règles de concentration des risques. Une situation qui illustre la fragilité persistante du secteur bancaire togolais.
Quel avenir pour le secteur bancaire togolais ?
Les efforts du gouvernement pour stabiliser les institutions financières sont indéniables, mais suffiront-ils à garantir un secteur bancaire robuste et pérenne ? La restructuration en cours pourrait permettre de restaurer la confiance et d’attirer de nouveaux investisseurs. Mais, le succès de cette stratégie dépendra de la mise en œuvre rigoureuse des réformes et de la capacité des autorités à assurer une gouvernance exemplaire.
Alors que le Togo s’efforce de renforcer son système financier, la privatisation de l’UTB et la consolidation d’IB Bank seront des tests décisifs. L’enjeu est clair : assurer un environnement bancaire stable, capable de soutenir la croissance économique et d’accompagner le développement du pays. Mais pour ce faire, il faudra conjuguer prudence budgétaire et attractivité du secteur financier pour éviter un effet boomerang sur les finances publiques.