La pandémie de Covid-19 profite à certains secteurs comme le numérique. Contrairement au numérique, le secteur bancaire lui connaît beaucoup de difficultés. Mais pour Adamou Sambaré, Directeur Général de Creditinfo West – Africa, société spécialisée dans la collecte de l’historique de paiement sur toutes les créances dans les huit (08) pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa), la « crise pourrait devenir une opportunité ». Il l’a exprimé dans une tribune publiée sur financialafrik.
« La Covid – 19 a frappé le monde avec un «double choc»: une contraction inédite de l’offre et de la demande couplée à un choix manichéen entre urgence économique et sanitaire. Pour l’Afrique, et donc l’Uemoa, la situation à court-terme est sombre. Cependant, si le secteur financier saisit ce moment comme un déclencheur pour une transformation profonde de l’écosystème des prêts et de ses processus, en prenant l’exemple d’autres marchés continentaux et en optimisant la puissance de l’infrastructure déjà en place, la crise pourrait devenir une opportunité », a mentionné Adamou Sambaré dans la tribune.
« Le secteur financier doit se montrer à la hauteur de la situation et doit être prêt à agir. Les deux nouvelles lignes directrices pour l’industrie du crédit seront l’évolution et l’innovation. Comme un « prêt responsable » se résume à une évaluation précise des risques, la clé se trouve dans les nouvelles données et dans les nouvelles technologies. Les crises ont historiquement accéléré des tendances déjà existantes, mais jamais comme aujourd’hui la technologie n’a été la principale force derrière la réponse de nos sociétés. Au Rwanda, par exemple, la proactivité du régulateur et la flexibilité des opérateurs de téléphonie mobile ont conduit à une multiplication par cinq des transactions mobiles et une multiplication par six de leur valeur pendant le confinement. En Indonésie, les transactions ont augmenté de 102% au cours des quatre premiers mois de 2020. Des mesures similaires ont été prises dans l’Uemoa, et le secteur bancaire peut faire davantage pour pleinement exploiter le data et les nouvelles technologies financières pour intercepter les opportunités post-crise », a-t-il expliqué.
« Un nouvel accent devrait être mis sur l’augmentation du volume des prêts, pour éviter une réduction drastique du crédit accordé. Dans une crise comme celle-ci, la réponse du secteur bancaire ne peut être que contre cyclique. Tout en gardant le contrôle des risques comme principal moteur, être une structure d’acquisition de clients à faible coût pour rentabiliser les « micro » et « nano-prêts » devrait être mise en place. Cette rentabilité encouragera les banques à accorder des prêts qu’auparavant elles auraient systématiquement refusés. Cet objectif sera atteint avant tout grâce à l’automatisation. L’avenir sera lieu de décisions d’octroi plus rapides, plus des prêts plus petits et des décisions automatisées. La Covid – 19 a révélé de nombreuses faiblesses : une lacune transversale et mondiale a été l’absence d’une véritable politique de digitalisation du système financier. Un système de traitement des prêts entièrement automatisé et équipé de nouveaux modèles de « scoring » alternatifs basés sur les données mobiles et le big data sera certainement un pilier du futur du secteur bancaire », a-t-il poursuivi.
« L’avenir de l’industrie du crédit semble être incertain. Les banques en ligne, les fintech, les services bancaires parallèles et d’autres prêteurs non-régulés bénéficient d’une plus grande flexibilité et absorbent déjà une part de marché des banques commerciales. Il est grand temps d’adopter des nouvelles technologies telles que les « prêts mobiles » ainsi que l’intégration de « big data » comme les données des opérateurs mobiles, les grands facturiers et la psychométrie dans l’évaluation des risques. Dans les marchés où les « prêts mobiles » sont naissants ou inexistants et où le marché du crédit est relégué à l’interaction physique dans une agence, le confinement a été très endommageant pour le crédit », a-t-il fait savoir.
« Au lieu d’être le grand égaliseur, Covid-19 a mis en évidence et amplifié les différences, qu’elles soient sociales, économiques ou sanitaires. La reprise économique dépendra du financement fluide et continu des entreprises et des ménages. Dans de rares moments comme ceux-ci, les prêteurs, les emprunteurs et les intermédiaires peuvent prendre la responsabilité de transformer le marché. Le marché du crédit est compétitif et volatil : les innovateurs seront récompensés », a-t-il conclut.